vendredi, mars 29, 2024

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Une vision de notre avenir écologique

Un virage réellement vert aura-t-il lieu ?

Comme bien des écologistes je suppose, je m’imaginais qu’un jour ou l’autre, les sociétés atteindraient un degré de conscientisation tel qu’il leur permettrait de prendre le virage vert (aussi appelée transition écologique), c’est-à-dire d’emprunter un chemin vers une réelle viabilité. J’attendais un réveil des sociétés, un sursaut qui permettrait enfin à la civilisation de réduire radicalement son empreinte écologique, de garder la planète intègre et fonctionnelle avec une nature en santé et florissante, tout en améliorant la vie des gens.

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C’était une vision idéalisée et naïve. Car les tendances lourdes que l’on observe ces dernières années montrent une incapacité chronique voire une absence de volonté désespérante de notre société à inverser, ou même seulement à faire fléchir la tendance, dans un contexte ou pourtant personne, ni le citoyen, ni le chef d’entreprise, ni l’homme politique ne peut plus désormais ignorer ou feindre d’ignorer la gravité des bouleversements planétaires. De fait, on se rend compte sans grande probabilité d’erreur, qu’un vrai virage vert, celui que nous appelons de nos vœux, n’aura tout simplement pas lieu. À la place, nous connaitrons très certainement une civilisation qui agira invariablement en réaction, seulement quand elle n’aura plus d’autre choix, et qui évoluera dans un environnement toujours plus insalubre.

Les tendances prises récemment par les activités humaines

Diverses tendances prises actuellement par nos sociétés montrent en effet que la viabilité des sociétés n’est pas (vraiment) à l’ordre du jour. En premier lieu, l’augmentation mondiale de la consommation du charbon, du pétrole et du gaz naturel, ou la recrudescence des projets visant leur exploitation, de même que les subventions qui continuent d’alimenter ce secteur industriel apparaissent totalement anachroniques quand on sait ce que l’on sait sur le réchauffement planétaire et sur l’acidification des océans. Le Canada avec sa prosternation servile devant ses sables bitumineux se font ainsi de facto le porte-étendard de cette absurdité historique. Cette tendance désastreuse est en fait plus large et plus inquiétante puisque c’est la production et la consommation mondiale de biens et de services qui augmentent inéluctablement tandis que le marché continue de se mondialiser, les accords commerciaux internationaux bi- ou multipartites continuant leur multiplication. Ajoutons que les villes continuent de s’étaler, que le parc automobile mondial continue de croitre, que le transport public ne s’impose pas suffisamment, que les terres s’anthropisent, que les aires protégées se multiplient trop lentement, que les forêts disparaissent, que les sols se dégradent progressivement, et que les espèces continuent de disparaître à un rythme anormal sous la pression simultanée de l’anthropisation du territoire, des espèces invasives, de la pollution et du réchauffement planétaire. Par ailleurs, ce sont les négociations internationales tenues sous l’égide de l’ONU qui piétinent (climat, biodiversité, désertification). Personne ne niera que celles concernant le réchauffement climatique sont pathétiques. C’est enfin l’écart entre les riches et les pauvres qui se creuse partout à travers le monde.

Vision d’avenir

Ces observations montrent une inquiétante incapacité de l’humanité, involontaire ou non, à embrasser adéquatement et avec une ampleur suffisante la problématique écologique. Les initiatives en place sont hélas trop peu nombreuses, n’ont pas l’envergure suffisante et ne sont soutenues ni par les gouvernements ni par les populations. Rien n’indique que notre inaptitude chronique sera surpassée à l’avenir, les faits rapportés ci-dessus suggérant visiblement le contraire. Ceci amène tout naturellement à conclure que dans les prochaines décennies, et probablement dans les prochains siècles, la pollution de l’air, de l’eau et du sol va se poursuivre. Plus généralement, c’est notre environnement qui continuera son inexorable dégradation et la planète son dérèglement graduel. Il semble maintenant clair que la société fonctionnera comme elle l’a souvent (toujours ?) fait, en réaction plutôt que de manière proactive, et que plutôt que de miser sur la clairvoyance et l’anticipation pour diriger et gérer l’aspect écologique des activités humaines, c’est l’économie qui dictera nos gestes comme nous le faisons depuis plus de deux siècles, et que le degré de détérioration environnemental ne représentera qu’un élément de « pondération ». Autrement dit, on peut présager que les sociétés seront, et sont déjà prêtes, à accepter et subir un niveau de dégradation avancé avant de réagir. Nous réagirons même très probablement une fois mis au pied du mur, avec des mesures limitant tant bien que mal la dégradation environnementale, malgré tous les dangers que cela implique puisque ce faisant, nous jouons littéralement aux dés avec le fonctionnement même de notre propre demeure, la Terre.

Virage vert
Cette figure symbolise la différence de parcours écologique selon le moment plus ou moins tardif où la civilisation amorce sa transition écologique. Plus elle est négociée tardivement, plus il est difficile de parvenir à la viabilité. La flèche en trait pointillé illustre le fait que plus on attend, plus le virage vers la viabilité est accentué (plus la transition est difficile). On peut prédire que la civilisation n’entamera sa transition écologique qu’au pied du mur et que cette dernière sera telle que l’environnement continuera de connaître une dégradation dans le futur, au mieux moins rapide qu’aujourd’hui (virage vert pâle), mais peut-être tout aussi rapide (virage brun).

Cela ne signifie pas forcément que l’existence de l’humanité sera menacée (quoique l’on puisse légitimement s’interroger sur cette question…). On peut cependant au moins prédire qu’à plus ou moins long terme, si notre milieu de vie s’avèrera sans doute tolérable pour vivre, les plus riches auront très certainement de meilleures conditions que les autres. Une partie de l’humanité, les plus vulnérables, risque en effet de pâtir grandement de la dégradation écologique. Remarquons au demeurant que c’est déjà le cas présentement. À plus long terme, peut-être ce monde sera-t-il tout juste supportable à l’être humain pour survivre ? Comme individu, tout porte à croire nous nous habituerons et accepterons progressivement à vivre dans un environnement de moins en moins sain, avec les inconvénients que cela implique pour la qualité de vie et la santé publique, tout comme les citadins s’habituent aujourd’hui sans broncher au smog ou comme les populations subissent, s’accommodent et se résignent déjà à un air vicié, ainsi qu’à des aliments et à une eau contaminés par les polluants et dont on ne connaît pas (encore) les effets.

Et si jamais un virage vert se concrétisait finalement, les données scientifiques nous indiquent qu’il est déjà très tard (mais il n’est jamais trop tard pour bien faire), que l’effort est titanesque (en fait il est probablement sans précédent), et qu’il sera extrêmement coûteux économiquement, et ce d’autant plus que tout retard coûte plus cher en ce domaine (nous avons au moins 40 ans de retard par rapport aux connaissances scientifiques, ce qui représente une dette économique inacceptable). Un tel virage sera très complexe et ne se fera pas sans heurt ni grincement de dents, mais il est obligatoire. Il reste une raison qui pourrait enfin déclencher une telle réaction. Puisqu’une dégradation écologique progressive ne semble pas suffisante pour provoquer un virage véritablement vert, on peut présumer qu’un événement environnemental majeur soir nécessaire pour faire subir un électrochoc à l’humanité. J’ai cependant froid dans le dos en imaginant ce à quoi un tel événement pourrait (ou devrait) ressembler et quelles pourraient en être les conséquences…

 

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