La capacité d’un état ou d’un individu est l’aptitude à résoudre des problèmes et à atteindre ses propres objectifs. Les impacts de la crise écologique mondiale étant plus sérieux dans les pays en développement, le développement des capacités est particulièrement important en Afrique dans le domaine de l’évaluation environnementale.
Les préoccupations environnementales en Afrique
Les activités humaines engendrent une alarmante dégradation de l’environnement, notamment l’érosion de la biodiversité, l’accès à l’eau, la désertification et les changements climatiques. Mais ce qui est notable dans cette crise écologique mondiale, c’est que les conséquences les plus graves se produiront dans les pays en développement, dont l’Afrique, qui compte près de 1 milliard d’habitants.
La situation environnementale du continent sera donc cruciale pour la vie et la survie des populations, et l’évaluation environnementale (EE) sera un élément essentiel permettant de gérer efficacement l’environnement en Afrique. C’est dans ce contexte que M. Koassi D’Almeida, titulaire d’un doctorat en sociologie, chargé de cours à l’ÉSAD et agent de recherche et de planification à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval, a présenté une conférence1 le 28 janvier 2011 intitulée « notions de capacité et de développement des capacités : application à la pratique de l’évaluation environnementale en Afrique ».
La prise en compte des préoccupations environnementales en Afrique est relativement récente. À la fin des années 50, alors que les états africains atteignaient leur autonomie, l’accent était mis essentiellement sur le développement économique et social : on cherchait à renforcer les capacités pour maîtriser les processus administratifs, productifs et économiques.
À la fin des années 80, et surtout à partir de la Conférence de Rio de 1992, la protection de l’environnement et le développement durable sont devenus des priorités. Les bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, ont demandé aux états l’adoption de plans d’action environnementaux, tandis que les conventions sur les changements climatiques, sur la désertification ou sur la biodiversité ont dû être mises en œuvre.
L’évaluation environnementales en Afrique
Le niveau atteint dans le domaine de l’EE est très varié en Afrique, de sorte qu’il est possible, ainsi que le propose M. D’almeida, de classer les différents états en 4 catégories allant de A à D. La première correspond aux états pour lesquels l’évaluation environnementale fonctionne bien, hormis quelques accros. La catégorie B rassemble des états pour lesquels l’évaluation environnementale fonctionne mais reste fragile et rencontre certaines difficultés. La catégorie C regroupe les états ayant un processus d’EE très moyen, alors que pour les états de la catégorie D, tout reste à faire en cette matière.
Dans le cas où l’évaluation environnementale rencontre des difficultés, l’analyse montre que les principaux obstacles se situent au niveau :
- Des agents de l’administration : manque de pratique, manque d’expérience, problème de mise à jour des connaissances, absence de politique de promotion et de valorisation, manque d’outils techniques, manque d’équipement adéquat et de documentation
- Des spécialistes des bureaux d’études : manque de pratique, manque d’expérience, faible niveau de compétence
- Des universités et des centres de formation : absence de programmes en environnement et en développement durable, manque de ressources humaines, manques de ressources matérielles
- Des décideurs et public : manque de sensibilisation, d’information et d’éducation
Un tel diagnostique montre que « l’aptitude d’un pays à s’engager dans la voie d’un développement durable dépend en grande partie des capacités de sa population et de ses institutions, ainsi que de sa situation écologique et géographique » (chapitre 37 de l’Agenda 212).
Notion de capacité
La capacité est définie comme « l’aptitude des particuliers, des organisations et des sociétés à exercer des fonctions, à résoudre des problèmes et à atteindre leurs propres objectifs ». Ainsi, les capacités que l’on peut considérer comme essentielles sont les suivantes :
- S’organiser, gérer et utiliser les ressources locales
- Définir des enjeux
- Formuler des stratégies et les mettre en œuvre
- S’approprier, pérenniser et capitaliser
- Faire le suivi
- Évaluer les résultats
- Développer une mémoire institutionnelle
- Aborder de nouveaux objectifs
Mais lorsqu’un pays ne possède pas de telles capacités, il devient essentiel de les développer afin de pouvoir atteindre les objectifs fixés.
Développement ou (renforcement) des capacités
Le développement des capacités se définit comme « un processus endogène (interne) au travers duquel une société modifie ses règles, ses institutions et son mode de vie pour accroître son capital social et améliorer ses facultés de réaction, d’adaptation et d’autodiscipline » (référence : capacity.org). On comprend dès lors que le développement des capacités est un processus extrêmement complexe, notamment pour respecter le critère endogène.
La complexité réside d’abord de la multitude des acteurs concernés : élus locaux, décideurs, ministères, institutions, chefs d’entreprise, associations professionnelles, universités et centres de formation, ONG, organisations et institutions internationales, médias, public, etc.
Tous ces acteurs doivent être impliqués, mais comme l’explique M. D’almeida, les relations et interactions qui les lient sont nombreuses et complexes. Le développement des capacités met donc en jeu différents facteurs tels que les valeurs locales, les pratiques culturelles et les pratiques politiques, et se joue à différents niveaux, soient les niveaux local, régional et international.
Ainsi, pour atteindre un système d’évaluation environnementale qui fonctionne, l’approche devra être systémique car selon M. D’almeida, les approches uniquement basées sur les populations ou uniquement basées sur les institutions ne réussissent pas
1 Cette conférence a été organisée le 28 janvier 2011 dans le cadre des conférences-midi de l’École supérieure d’aménagement du territoire et de développement régional (ÉSAD) et du Centre de recherche en aménagement et en développement (CRAD)
2 L’Agenda 21 a été adopté en 1992 lors du Sommet de la Terre qui a eu lieu à Rio. Ce plan d’action examine les problèmes à régler en matière de développement et d’environnement pour le 21ième siècle