Comme l’explicite l’équation dite de « l’impact des activités humaines » et comme rappelé ailleurs, la démographie est des cinq facteurs qui influencent l’empreinte écologique d’une société ou d’une civilisation. Or, la population mondiale actuelle augmente rapidement, notamment depuis le 19e siècle et surtout depuis les années 1950. Parallèlement, la dégradation écologique globale ne cesse de s’accroître. Est-ce à dire que la population mondiale est trop élevée ?
Il faut d’abord noter que si effectivement la population grandit à un rythme considérable, la croissance démographique commence à ralentir du fait de la transition démographique que connaissent les pays qui se développent et s’industrialisent. Pourtant, malgré ce fléchissement, la dégradation environnementale continue de s’accroître. Comme l’illustre la figure ci-dessous, les variables représentatives de l’évolution de l’état de la planète augmentent sensiblement au même rythme que la croissance démographique. Les variables typiques présentées ici sont la température terrestre moyenne, le niveau global des océans et la surface de terres converties à l’agriculture et au pâturage. Ce dernier indicateur montre néanmoins une certaine divergence par rapport à la croissance démographique du fait d’un ralentissement dans les dernières décennies.
Ces données illustrent le fait que l’empreinte écologique (ou, ce qui revient au même, la dégradation environnementale) évolue en première approximation proportionnellement à la démographie. Cependant, si un lien direct existe bel et bien entre ces variables et la démographie, ce lien ne doit pas nous faire oublier que le niveau de dégradation environnemental et la vitesse d’augmentation de l’empreinte écologique des sociétés par rapport au taux de croissance démographique dépend fondamentalement du système socioculturel et économique.
Ce lien entre démographie et empreinte écologique ne signifie donc pas que la population mondiale soit aujourd’hui « trop élevée » puisque la façon dont vit l’ensemble d’une population socialement ou individuellement compte en fait bien davantage dans le bilan environnemental. L’augmentation de l’empreinte écologique de l’humanité et le niveau qu’elle a atteint aujourd’hui pourrait être en fait beaucoup plus mesuré si la civilisation actuelle avait adopté un autre modèle de fonctionnement. Le système socioéconomique, les modes de vie individuels et collectifs, les choix ou les nécessités technologiques sont prépondérants devant la démographie pour déterminer l’empreinte écologique per capita, donc l’empreinte écologique globale. Autrement dit, deux civilisations qui diffèrent par leur « culture » au sens large peuvent induire des détériorations écologiques plus ou moins intenses pour une même taille de population.
Ce fait est schématisé sur la figure ci-dessous. Elle montre la dégradation environnementale d’une civilisation hypothétique ayant une empreinte écologique par habitant faible, qui augmente proportionnellement avec la population, mais lentement comparativement à une civilisation ayant une empreinte écologique élevée. Une société pourrait même éventuellement être viable si cette empreinte écologique était suffisamment faible et augmentait assez lentement.
Une manifestation de la prépondérance de la « culture » sur la démographie est très simplement attestée par le fait que les pays industrialisés ont globalement une empreinte écologique plus marquée que celle des pays en développement (PED). Chacun sait en effet que l’empreinte écologique de l’Occident est plus élevée que celle des pays pauvres, parce que les premiers consomment plus de ressources, de biens et services, et d’énergie par habitant. À titre d’exemple, les pays du Nord et quelques pays du Golfe persique, consomment globalement plus d’eau potable par habitant que les PED, hormis quelques exceptions [1]. Les pays riches sont aussi en moyenne de plus grands émetteurs de GES par habitant [2]. Par suite, si l’ensemble de la population terrestre avait une empreinte écologique par personne considérablement réduite, c’est-à-dire si les pays riches réduisaient considérablement la leur et si les pays émergents réussissaient à se développer avec une empreinte écologique mesurée, l’humanité pourrait peut-être être viable (sur le long terme).
C’est aussi du fait de la prédominance du mode de vie que la répartition de la population mondiale à travers les différents États compte également dans le bilan environnemental mondial, chaque pays ayant son propre niveau de développement, sa propre culture, son propre mode de vie et son empreinte locale. C’est aussi pour cette différence d’impact par habitant que le phénomène de migration des populations joue un rôle sur le bilan global. Quoiqu’il en soit, la prépondérance du type de société ne doit pas empêcher les sociétés de mettre en place des mesures visant à modifier leur mode de fonctionnement pour le rendre moins dommageable pour l’environnement, mais aussi à limiter la croissance démographique, par la promotion de l’éducation, notamment chez les filles, et par des mesures de planification familiale des naissances.
Bibliographie
[1] A. Y. Hoekstra, M. M. Mekonnen, Proc. Nat. Acad. Sci. (2012) 109 3232.
[2] Indicateur des objectifs du millénaire, Division Statistique des Nations Unies (2013) http://mdgs.un.org/unsd/mdg/Data.aspx.
La maîtrise de la population devrais être le principal combat de l’ONU , à l’origine de 90%des problèmes mondiaux,(rechauffement, gestion eau, famines, deplacements de population…)mais c’est un sujet a la foi tabous mais aussi ou la competence ou le courage des « décideurs » fais cruellement défaut.
Merci pour ce commentaire. La population est sans aucun doute un facteur important dans l’empreinte écologique mondiale. Cependant, le mode de vie est de mon point de vue beaucoup plus important. À populations égales, celle dont le mode de vie est en harmonie avec la nature aura un coût écologique considérablement moindre. Donc, si on doit effectivement prendre des mesures pour l’accès à la contraception et à l’éducation des jeunes femmes, notre priorité devrait porter sur une réduction radicale de la production industrielle et de la surconsommation. De telles mesures sont d’ailleurs préconisées par l’ONU elle-même, qui est une des rares organisation à se préoccuper de ce genre de thématique.
Dans l’article, le modèle économique n’est nullement remis en cause!
Et c’est lui qui a entrainé la croissance de la population
Les « émergents » n’aspirent qu’a une chose consommer plus, vivre mieux,être mieux soignés, plus éduqués … tous facteurs qui accroitront encore la démographie, la consommation de ressources naturelles, d’énergie et accentueront la dégradation de l’environnement et la paupérisation générale
Seul un changement radical de modèle couplé avec une diminution drastique de la population peut permettre la sauvegarde de la biodiversité, soit on la met en place sans tarder, soit elle se produira naturellement et on la subira … comme les bactéries dans la boite de Pétri
Je suis tout à fait d’accord avec vous ! Je vous invite à aller voir cette page pour voir ce que pense de l’économie https://planeteviable.org/developpement/economie/
C’est une erreur d’analyse ravageuse qui néglige lamentablement le fait que sur 150 ans le facteur prépondérant de l’émergence du risque climatique (à hauteur de 75%!) est l’essor démographique car sur cette période :
– la population a été multipliée par 6
– les rejets per capita par 2
Ensuite parce que l’essor démographique est le socle commun de la plupart de nos problématiques de développement qu’il rend non durables par la pression qu’il induit