vendredi, avril 19, 2024

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Le fardeau économique de la dégradation environnementale

Les services que nous rend la nature

Une des grandes failles de l’économie actuelle, c’est qu’elle n’intègre pas la dégradation de l’environnement dans ses opérations, car cette dégradation n’a pas qu’un coût écologique ou social, elle a aussi un coût monétaire. La faune, la flore et les habitats fournissent en effet aux êtres humains de nombreux services dits « écosystémiques ». Ces services sont « gratuits », mais leur restauration ne l’est pas. Il y a d’abord les services vitaux, qui nous procurent l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons et la nourriture que nous mangeons, leur disponibilité et innocuité étant essentielles pour chacun de nous. Les écosystèmes nous fournissent également le domicile dans lequel nous habitons, les matières premières nécessaires à la fabrication des produits que nous consommons, ils contribuent à la régulation du climat, assurent la qualité des sols et des rivières, limitent les répercussions des catastrophes naturelles, etc. Ces services sont aussi indispensables au tourisme et à la culture des sociétés, que ce soit au plan esthétique, scientifique ou spirituel. En fait, c’est autant la santé et le bien-être humain que l’ensemble des activités humaines, y compris l’économie, qui reposent et dépendent directement des écosystèmes.

Les liens économie – nature

En effet, et premièrement, l’économie a besoin de la nature du fait que cette dernière « alimente » en matière les activités économiques de production. La rareté d’une ressource ou une pénurie réduit l’offre et peut engendrer une flambée des prix de cette ressource et affecter l’économie mondiale. Les deux « chocs » pétroliers des années 70 ont ainsi eu de fortes répercussions négatives sur l’économie mondiale, alors que la hausse du prix du pétrole vécue en 2008 à contribué à la crise alimentaire dont il a été question plus haut. Une gestion plus harmonieuse et véritablement durable des ressources permettrait peut-être de stabiliser l’économie mondiale et ainsi de réduire les impacts sociaux de ses soubresauts.

Deuxièmement, la perte ou la dégradation des services écosystémiques a un coût, soit pour les restaurer, soit pour les remplacer, soit encore pour en atténuer les impacts. Pensons par exemple à la raréfaction des ressources halieutiques qui ont des impacts étendus, durables et dramatiques sur l’industrie de la pêche, ou aux coûts de santé dus à la pollution de l’air et aux maladies cardio-respiratoires qui y sont liées. Et c’est sans parler des effets de la pollution en général dont nous ne connaissons pas toutes les conséquences à moyen et long terme. Pensons également aux coûts associés aux conséquences des changements climatiques et à la réduction de leurs effets que nous n’aurons d’autre choix que de considérer véritablement à terme. En fait, nous avons commencé à dépenser du fait du réchauffement planétaire (coûts de santé des épisodes caniculaires, démocratisation de la climatisation, etc.), des dépenses qui vont se diversifier et s’intensifier à l’avenir.

La fragilité de l’économie

Une trop grande détérioration des écosystèmes et de l’écosphère en général peuvent donc finir par nuire aux activités économiques elles-mêmes. Si l’économie mondiale ne ressent pas toujours le contrecoup de la dégradation écologique et de la raréfaction des ressources, c’est du fait que nous n’avons pas encore atteint des seuils de dégradation critiques. Et si le marché n’en n’a pas vraiment encore subi les conséquences au niveau mondial, les problèmes écologiques ont des répercussions immédiates et néfastes au niveau local sur les activités économiques des communautés ainsi que des impacts sociaux.

Mais, l’étroite interconnexion de notre marché globalisé peut fragiliser le système économique et le rendre vulnérable. Les analyses historiques montrent en effet que les sociétés peuvent tomber dans des « spirales d’effondrement » (collapse traps) [1,2]. Ces spirales peuvent se manifester quand le marché reste enflé sur une trop longue période de temps, épuisent ainsi le capital écologique de certains nœuds du réseau commercial, ce qui in fine anéantit ces centres de production alimentaire. L’exode qui s’ensuit et/ou la déliquescence d’un centre de production qui en résulte peut induire la rupture des liens avec le reste du réseau l’ensemble du marché commercial, et le faire s’effondrer par effet domino par le passé, comme cela a pu se passer pour la civilisation maya [2]. L’histoire nous montre ainsi que lorsqu’une civilisation est étroitement interconnectée dans un marché commercial comme l’est la nôtre, une perturbation du système économique peut induire une réaction en chaîne d’effondrement irréversible si la capacité de résilience du système naturel a été trop profondément compromise.

Bibliographie

[1] J. Diamond, Le troisième chimpanzé (1992) Folio essais.

[2] S. Heckbert, « Lessons from a simulated civilisation, » Global change (2013).

 

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