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Les enjeux de la conférence de Copenhague

Lundi 2 novembre 2009 a eu lieu dans le hall du Musée de la Civilisation une table ronde intitulée « Copenhague : rendez-vous pour la Terre ? », et qui portait sur la conférence de Copenhague (Danemark), autrement appelée 15ième Conférences des Parties (CdP-15), qui se déroulera du 7 au 18 décembre prochain. François Bugingo était le modérateur et les participants étaient :

  • Mme Fatima Dia Touré, directrice de l’institut pour l’énergie et l’environnement des pays francophones de l’organisation internationale de la francophonie, et juriste environnementaliste
  • Jean-Maurice Arbour, professeur associé à la faculté de droit de l’Université Laval, spécialiste en droit international public et droit international de l’environnement
  • André Boisclair, ancien ministre de l’environnement du Québec, consultant en développement durable et changements climatiques à la société Ernst & Young

La rencontre a abordé différents thèmes (voir l’intégralité de la rencontre en vidéo sur le site du musée). En voici un résumé (avec des compléments glanés par-ci par-là, voir la bibliographie en bas de page).

 

Qu’est-ce que la conférence de Copenhague ?

La conférence de Copenhague est la prochaine grande conférence internationale portant sur les changements climatiques, sur les moyens de réduire les gaz à effet de serre (GES) et de fixer des cibles propres à l’ensemble des pays. Elle fait suite à différentes conférences qui ont porté sur ce sujet par le passé.

En résumé, la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC, ou UNFCCC en anglais) a été ouverte à ratification en 1992 et entrée en vigueur le 21 mars 1994. Elle a été ratifiée à ce jour par 189 pays dont les États-Unis et l’Australie.

Le protocole de Kyoto a suivi et a conduit à un calendrier de réduction des émissions de GES pour 38 pays industrialisés, avec une cible de réduction globale de 5,2 % des émissions de CO2 en 2012 par rapport aux émissions de 1990, l’année de référence. Le protocole a été ouvert à ratification le 16 mars 1998, et est entré en vigueur en février 2005. Il a été ratifié à ce jour par 172 pays à l’exception des États-Unis. Le Canada l’a ratifié en 2002.

En décembre 2007 a eu lieu une autre conférence à Bali (Indonésie) dont l’objectif était d’établir un calendrier des négociations entre les membres afin de prendre le relais du protocole de Kyoto. Aucune décision concernant des cibles contraignantes n’y a été prise, mais une feuille de route y a été adoptée. Le document final qui en ressort renvoie aux conclusions des travaux du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC), notamment une réduction globale (i.e. à l’échelle mondiale) et impérative des émissions de GES d’au moins 50% par rapport à 1990 d’ici 2050, avec différents scénarios de réduction pour les pays industrialisés et les pays en développement.

La conclusion d’un accord succédant au protocole de Kyoto doit se réaliser au plus tard en décembre 2009. La conférence de Copenhague se tiendra dans ce but. Cet accord devra cette fois impliquer les pays en développement.

Quels sont les enjeux de la conférence de Copenhague ?

Les risques de ne rien faire

Le réchauffement climatique représente une grande menace pour la faune, la flore et pour l’humanité. Le dernier rapport du GIEC de 2007 fait état du réchauffement climatique, ainsi que de son origine anthropique, de ces conséquences atmosphériques, océaniques et continentales. En voici quelques-unes :

  • – Hausse des températures océaniques et continentales moyennes
  • – Hausse du niveau moyen des océans
  • – Diminution du couvert neigeux, fonte des glaces et glaciers
  • – Augmentation des précipitations
  • – Zones désertiques en augmentation

(Voir l’article sur l’état de santé de la planète juste avant Copenhague)

Ce réchauffement climatique et ses causes anthropiques ont des répercussions sur l’humanité entière. L’enjeu de cette conférence se mesure par ces répercussions possibles, ou probables, surtout dans le cas de l’inaction ou d’une trop faible réponse de nos sociétés. Dans certains cas, les impacts sur l’humanité ont déjà commencé. On peut ainsi observer et prédire :
Un risque d’épuisement des ressources, notamment les ressources pétrolières, même si ce problème apparaît moins criant selon certains expert que selon d’autres.

  • – Des déplacements de populations (réfugiés climatiques), conséquence de la hausse du niveau des océans (érosion accrue des côtes maritimes, zones innondables en hausse aussi bien près des côtes qu’à l’intérieur des terres)
  • – Un problème pour certaines populations à avoir accès à certaines ressources, en particulier l’eau qui devient ou deviendra rare dans certaines parties du monde (désertification, assèchement des rivières, lacs et nappes phréatique).
  • – Des crises alimentaires

De plus, ce rapport donne l’évolution possible du climat et ses conséquences probables en se basant sur certains modèles. Ces conséquences environnementales du réchauffement planétaire sont ou seront des sources potentielles ou avérées de tension entre pays limitrophes ou non, et donc sources de conflits potentiels, par exemple pour l’accès à l’eau. Les conséquences du réchauffement planétaire sont également un enjeu de sécurité : sécheresse, inondations, migrations, accès concurrentiel à l’eau et aux terres arables (voir bibliographie ci-dessous).

On estime que l’augmentation des températures ne devrait pas dépasser 2°C. Au-delà, les impacts du réchauffement climatique s’accélèrent rapidement et les phénomènes dangereux deviennent plus probables.

Les enjeux des négociations

Les contraintes et les enjeux économiques

Table ronde Participe presentLes négociations doivent maintenant intégrer les pays en voie de développement (ainsi que les pays qui n’ont pas diminué leur émissions de GES par rapport à 1990, par exemple les Etats-Unis et le Canada).

Ces négociations doivent tenir compte des nécessités propres à pays. Les effets des changements climatiques et les possibilités de réponse ne sont pas les mêmes partout, notamment quand on compare les pays du nord et ceux du sud. Mais, même encore là, il y a des disparités : le Bangladesh par exemple n’a pas les mêmes moyens économiques que la Chine.

Un des premiers impondérables à considérer est le droit au développement des pays émergeants. Autrement dit, la réduction des GES ne doit pas être un frein à leur développement. Ce droit fait donc en sorte qu’on ne peut pas leur demander le même effort qu’aux pays riches, surtout que ces pays manquent parfois de ressources financières. Mais, au vue de la situation critique de la planète telle que décrite par le GIEC, les pays en voie de développement doivent malgré tout eux aussi limiter leur émissions de GES. À ce sujet, il semble que certains pays émergeants comme la Chine et l’inde se cachent d’ailleurs derrière le fait que les Etats-Unis et le Canada ont continué d’augmenter leur émissions de GES depuis 1990 pour ne pas s’engager dans un programme avec des cibles contraignantes.

Il va donc falloir que les pays riches, et notamment l’Amérique du Nord et l’Australie, les plus gros pollueurs par habitant, fassent preuve de bonne volonté et agissent. Au contraire, l’Union Européenne (UE) fait figure de premier de classe en matière de réduction des GES. Les émissions de GES de l’UE ont diminué de 7,9% par rapport aux niveaux de 1990 (http://www.eea.europa.eu/fr/pressroom/newsreleases/les-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-au-sein-de-l2019union-europeenne-ont-diminue-en-2005)

Une autre partie de la solution réside dans une aide directe des pays riches aux pays en voie de développement. C’est ce que suggèrent nombre d’environnementalistes des pays occidentaux. C’est aussi ce que réclament des pays comme la Chine et l’Inde qui ne veulent pas limiter leur croissance. On mentionne que la Chine et l’Inde demandent 1% du PIB de tous les pays industrialisés en aide, ce qui représente autour de 300 milliards de dollars américains ! Et de fait, il est incontestable que la richesse actuelle des pays industrialisés a été et est encore basée sur la production de GES, puisqu’une grande partie des GES que l’on retrouve aujourd’hui dans l’atmosphère ont été émis dans les 250 dernières années principalement par l’occident. L’aide des pays riches aux pays en développement est donc un devoir  et une obligation morale. Par ailleurs, il faut aussi des garanties pour que l’aide soit utilisée à bon escient et aide effectivement la population.

Mais les pays riches sont-ils prêts à admettre leur responsabilité ? Quelles concessions financières seront prêts à accepter les gouvernements des pays riches face à cette demande lors des négociations de Copenhague ? La question qui en dépend est : jusqu’à quel point les citoyens sont-ils prêts à ce que leur gouvernement aide financièrement les pays en développement ? Dans quelle mesure sont-ils prêts à perdre, peut-être, une petite partie de leur qualité de vie, ou simplement à voir cette qualité de vie s’améliorer moins vite ? Jusqu’à quel point les citoyens sont prêts à modifier leur mode de vie, leur mode de consommation ?

L’aide donnée aux pays en développement leur servira également à s’adapter aux effets des changements climatiques. L‘adaptation des pays riches est un point qu’ils devront également considérer pour leur propres territoire et auquel il faudra un investissement financier important. Par exemple, au Canada, certaines infrastructures telles les aérodromes devront être consolidées (déplacées ?) à cause de la fonte du pergélisol. La gestion et l’occupation du territoire devra donc être revue.

Les moyens d’action

L’aide des pays riches au pays en voie de développement peut prendre deux formes principales : une aide par l’achat de crédits compensatoires ou une aide directe (transferts technologiques).

Pour réduire leurs émissions de GES, les pays peuvent également imposer un taxe sur le carbone (taxe environnementale). Il est avéré que pour diminuer efficacement la production de GES, il faut taxer les émissions de GES, aussi bien par les entreprises que par les individus. La Finlande a été le premier pays à instaurer un telle taxe en 1990, tandis que la Suède l’a fait en 1991. La France vient également d’implanter une taxe carbone en 2009. Il est clair qu’instituer une taxe carbone le plus tôt possible permet de la mettre en place en douceur et de pouvoir l’ajuster à un rythme acceptable.

Pour réduire leurs émissions de GES , on souligne l’intérêt d’une bourse du carbone (« cap and trade » en anglais). Il semble qu’au Canada, de nombreuses entreprises soient prêtes à participer à une telle bourse de carbone. Elles attendent simplement de connaître les « règles du jeu ».

En Amérique du Nord, les regroupements d’états fédérés tels que le WCI (voir plus bas) sont des agents de changements, parce qu’ils font du lobbying auprès des gouvernements fédéraux pour que ceux-ci avancent au niveau législatif et exécutif dans la lutte aux changements climatiques. En essayant de développer une bourse du carbone, ils pressent sans aucun doute les gouvernements fédéraux de le faire sur une plus grande échelle. Cependant, les états américains et les provinces sont mal équipés en ressources humaines en ce domaine et semblent avoir encore peu de compétences pointues en ce qui a trait aux bourses de carbone. Il semble que ce soit surtout les gouvernements fédéraux qui possèdent les personnes ressources compétentes en cette matière. Les provinces canadiennes et les états américains se familiarisent et apprennent comment fonctionne une telle bourse. Quoiqu’il en soit, il est clair qu’une telle bourse est d’autant plus efficace qu’elle englobe les nations au complet plutôt que de rester locale.

Si un effort très substantiel des nations est dorénavant indispensable pour enrayer rapidement la croissances des GES, il reste que le développement de nouvelles technologies est également requis pour accroître l’efficacité énergétique de nos sociétés. Certaines technologies sont également pressenties pour séquestrer le CO2 (dans la mer dans le sous-sol). Cette dernière technologie pose des problèmes éthiques.

En conclusions, malgré l’objectif commun de réduire l’effet de serre de la planète, les pays en voie de développement et les pays industrialisés ont des intérêts divergents. Les négociations s’annoncent donc particulièrement complexes. Les négociations de la CCNUCC dépasse les changements climatiques et touchent en fait les relations internationales, notamment les relations nord-sud. L’enjeu de la conférence de Copenhague est de s’entendre pour atteindre des cibles qiu soient acceptables pour tous.

Quelle est la situation au Canada / au Québec ?

Le Canada a ratifié le protocole de Kyoto en 2002. Durant la période 1986-2006, le canada a augmenté ses émissions de GES de 26%. Depuis l’ouverture à ratification du protocole de Kyoto en 1998, aucun plan de réduction des GES n’a été mis en place par le gouvernement du Canada. Depuis longtemps déjà, le gouvernement a une attitude passive et semble attendre les décisions du gouvernement des Etats-Unis en matière des GES. C’est notamment le cas depuis l’investiture de M. Barak Obama.
Au niveau international, le Canada a extrèmement mauvaise réputation concernant la lutte aux changements climatiques. Cette mauvaise réputation est due au manque d’action du gouvernement canadien et au fait que ce dernier nuit aux négociations lors des conférences internationales.

Certaines provinces canadiennes ont pris les devants et participent au Western Climate Initiative (WCI), un regroupement de 4 provinces canadiennes (Colombie-Britannique, Manitoba, Ontario et Québec) et de 7 États des États-Unis (Californie, Washington, Utah, Nouveau-Mexique, Arizona, Montana, Oregon) qui a pour objectif de se doter d’une approche commune de lutte contre les changements climatiques, notamment par l’élaboration et la mise en place d’un système de plafonnement et d’échanges de droits d’émission de GES. La cible commune du WCI est de ramener les émissions de GES en 2020 à celles de 1990 (15% de réduction par rapport aux émissions de 2005). La nouvelle-Écosse et la Saskatchewan participent à ce regroupememt en tant qu’observateurs.

Étant une province candadienne, le gouvernement du Québec ne participe pas aux CCNUCC. Il a adopté un plan d’action pour la période 2006-1012 qui a deux axes principaux : la réduction des GES et l’adaptation aux changements climatiques. Un des objectifs pour 2012 est de réduire les émissions de 6% par rapport à 1990.
Le 18 avril, 2008, le Québec a joint la Western Climate Initiative (WCI). La cible de réduction des GES n’est pas déterminée.
Le gouvernement du Québec a procédé à des consultations du 22 octobre au 4 novembre 2009 en vue de fixer la prochaine cible de réduction des émissions de GES du Québec à l’horizon 2020. Cette consultation s’est déroulée dans le cadre d’une commission parlementaire de l’Assemblée Nationale (voir http://www.mddep.gouv.qc.ca/chang-clim/2005-2020/cible2020.htm).

Il est à noter que du fait de la prépondérance de l’hydroélectricité au Québec, les émissions de GES de ce secteur sont faibles. De ce fait, bien que n’ayant pas eu de plan pour réduire ces GES (sauf récemment), le Québec se place en assez bonne position pour ses émissions actuelles de GES si on le compare à d’autres pays, y compris des états européens. Par conséquent, les réductions que devra opérer le Québec seront rapidement difficiles et couteuses. Il est à noter également que l’affirmation selon laquelle l’hydroélectricité n’émet pas de GES est contestée par les Etats-Unis, les barrages étant considérés commes des émetteurs de méthane. Les Etats-Unis pourraient donc ne pas faire appel à l’hydroélectricité québécoise pour remplacer leurs centrales électriques à base de combustible fossile. La levée de cette controverse demande des données scientifiques précises.

À quoi peut-on s’attendre de la conférence de Copenhague ?

Différents scénarios peuvent être envisagés. On peut se montrer optimiste et penser qu’un consensus soit atteint, même imparfait. Mais on peut aussi être très circonspect quant au succès de la conférence de Copenhague, notamment au vu des intérêts totalement antagonistes des Parties et du fait que les pays s’observent les uns les autres sans prendre d’initiatives. Le court délai qui reste avant la conférence de Copenhague plaide hélas aussi en ce sens. Au mieux, la conférence pourrait n’être qu’un vague tremplin vers un Copenhague 2.

Certains commencent à penser qu’il serait temps de penser autrement (que dans le cadre de telles conférences stériles), qu’il est temps d’inverser le mode de pensée, et que, plutôt que d’attendre que les gouvernements des différents pays s’entendent au fil des conférences, qu’il vaudrait mieux tabler sur les initiatives locales d’envergure de la part des citoyens, des communautés, des municipalités, et des provinces et des états (comme le WCI). De telles actions pourraient servir de levier pour entraîner les pays dans une baisse significative des GES.

Pourtant, il semble illusoire de simplement se baser sur des initiatives spontanées des gouvernements, même sous une forte pression imposée par la bonne volonté des populations. Un échéancier international, clair et stricte semble réellement nécessaire.

Un échec (la non adoption de cibles précises) à Copenhague est très peu souhaitable au vu de l’urgence d’agir.

Que pouvons-nous faire en tant que citoyen ?

  • – Avoir des gestes de développement durable dans notre vie de tous les jours. Nous devons tous apprendre les gestes écologiques qui diminuent notre empreinte environnementale. C’est un apprentissage pour que ces gestes deviennent une seconde nature et pour en incorporer de nouveaux dans notre vie de tous les jours.
  • – S’informer et s’engager dans l’action citoyenne pour forcer nos gouvernements à agir. Des organismes existent et permettent d’atteindre ces deux objectifs (on mentionne Greenpeace, la fondation David Suzuki et Équiterre au Québec).

Quelques compléments d’informations :

Convention-Cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) : http://unfccc.int/portal_francophone/items/3072.php

Site developpementdurable.com :

  • http://www.developpementdurable.com/politique/2009/10/A3265/il-ny-aura-pas-de-traite-a-copenhague-selon-yvo-de-boer.html
  • http://www.developpementdurable.com/politique/2009/10/A3325/copenhague-un-accord-condamne.html
  • http://www.developpementdurable.com/politique/2009/10/A3284/climat-leurope-sera-t-elle-prete-pour-copenhague.html

Gouvernement du Québec (ministère du développement durable, de l’Environnement et des parcs) : http://www.mddep.gouv.qc.ca/

http://www.mddep.gouv.qc.ca/chang-clim/2005-2020/cible2020.htm

Environnement Canada : http://www.ec.gc.ca/

Sur la nation de sécurité climatique, voir par exemple :

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