samedi, avril 20, 2024

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La concurrence et la nécessité de vendre

L’économie actuelle est basée sur des monnaies d’échange et sur le libre marché. Pour perdurer, une entreprise ou un commerce doit être rentable, donc faire des profits. Elle doit réaliser une marge sur chaque produit vendu ou sur chaque service fourni, une marge qui soit suffisante pour que, sur la quantité totale de ventes, l’entreprise soit bénéficiaire. Un des moteurs de l’économie dominante et de la croissance économique est donc la consommation. Sans elle, inutile de produire ; sans elle, pas de croissance économique possible. Par conséquent, plus les ventes sont élevées, meilleure est la situation d’une entreprise Néanmoins, les entreprises doivent rester vigilantes, car elles sont continuellement confrontées à la concurrence, ou compétition. Celle-ci est un des paramètres importants qui bloquent ou freinent l’instauration de sociétés viables.

Si, comme le plaident les défenseurs de l’économie capitaliste, la concurrence a des avantages intrinsèques pour le consommateur, par exemple l’assurance de pouvoir choisir le fabricant le moins cher ou le produit qui offre le meilleur rapport qualité-prix, elle a aussi des conséquences néfastes. Premièrement, ces avantages théoriques pour l’acheteur ne se suffisent pas à eux-mêmes comme l’illustre la nécessité pour une société d’assoir son économie sur des réglementations qui protègent les consommateurs. Les abus sont en effet monnaie courante, quand il ne s’agit pas carrément d’escroqueries. Mais surtout, pressé par le principe de la concurrence, l’entreprise doit vendre suffisamment, ce qui se traduit la plupart du temps par une volonté de vendre toujours plus. L’entreprise est donc portée spontanément et continuellement à gagner des parts de marché, à diversifier ses produits, ou encore à vendre le moins cher possible (donc à réduire ses coûts de production), ou les trois à la fois. Plus précisément, parmi les options possibles, une entreprise peut, ou doit :

  • Inciter ses clients à acheter plus de produits
    • En proposant constamment de nouveaux produits à ses clients, notamment grâce à l’innovation
    • En offrant des produits jetables ou non durables (à l’extrême, il s’agit d’un incitatif à l’obsolescence programmée)
    • En développant des stratégies publicitaires, de marketing (par exemple, un emballage attrayant ou l’accès au crédit) et de prix (par exemple le sous-dimensionnement)
  • Inciter plus de consommateurs à acheter ses produits
    • En développant des stratégies publicitaires, de marketing et de prix, et en proposant des produits qui vont tenter de nouveaux consommateurs (par exemple l’emplacement dans le magasin)
    • Réduire ses coûts de production (diminuer les prix de ventes)
    • En modernisant ses moyens de production, notamment par l’innovation technologique
    • En ayant des salaires bas, notamment en produisant dans des pays où les salaires sont plus bas (délocalisation)
    • En ayant un prix de vente bas, donc un incitatif à offrir des produits de qualité moindre
  • Protéger ses intérêts
    • Agir comme lobbyiste auprès des gouvernements et des instances internationales pour influer sur la réglementation environnementale ou sur celle liée au travail (salaires, avantages sociaux)

Ces stratégies, fortement suscitées par la pression de la concurrence (ou par d’autres motivations plus mercantiles et plutôt condamnables), ont des impacts autant sociaux qu’environnementaux. Ces stratégies sont de puissants incitatifs à la surconsommation, aidées en cela par l’absence de prise en compte dans l’économie des impacts environnementaux. La surconsommation soutient ainsi la « nécessaire » croissance et inflige son impact écologique grandissant, alors que la réglementation actuelle est trop faible pour pallier ou atténuer cette tendance. Cette incontournable nécessité de rester compétitif est telle qu’une entreprise n’a que peu de latitude (mais elle existe pourtant) et n’a la plupart du temps d’autre choix que d’adopter les mêmes pratiques que ses concurrents. Ce mécanisme représente sans doute un des verrouillages les plus nuisibles à l’adoption de mesures de réduction de l’impact des activités humaines.

En l’absence de réglementation suffisante, une entreprise est portée à ne pas amenuiser son impact sur la nature, une préoccupation souvent considérée comme une dépense. Ne compte alors que les préoccupations économiques. On sait pourtant que pour une entreprise, adopter des pratiques sociales et environnementales peut être rentable économiquement (économies d’eau, d’énergie, de matières, attraction des meilleurs employés), les exemples sont légions (InterfaceFlor (ref) ou Cascades au Québec/Canada par exemple). Mais cela peut aussi représenter des investissements qu’une entreprise peut ne pas toujours se permettre. Toute entreprise ne peut se permettre d’être aussi vertueuse dans le contexte de la concurrence. À quoi bon mettre en place des procédures vertes si c’est pour finalement être obligé de mettre la clé sous la porte ? Il apparaît donc nécessaire que toutes les entreprises soient contraintes, d’égale façon, de suivre les mêmes règles incitatives visant à diminuer l’empreinte écologique des entreprises. Il s’agit d’un problème institutionnel ou de gouvernance.

En particulier, le commerce étant un marché mondial (globalisé), pour que les entreprises des différents États ne soient pas défavorisées, il faut que tous les États de la planète soient soumis aux mêmes règles commerciales. Il faut donc que les pratiques qui concourent à instaurer une société viable ne soient pas désavantagées, ce qui nécessite d’encourager et d’encadrer ces pratiques au niveau mondial, ce que la gouvernance internationale ne réussit tout simplement pas à accomplir.

 

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